Par Pierre Mudet, associé et Fabienne Kerebel, counsel

Le Say on pay : l’ambivalence du contrôle des rémunérations des mandataires de sociétés cotées

En quelques années, le say on pay - entendu comme le dispositif de vote des actionnaires sur la rémunération des mandataires sociaux, tant au titre de l’exercice en cours (vote ex-ante) que de l’exercice écoulé (vote ex-post) - s’est imposé comme le métronome de la rémunération des mandataires sociaux des sociétés cotées, dont il a profondément remodelé le régime juridique.

Le législateur français a instauré et modelé un say on pay « à la française », dont les exigences vont au-delà des prescriptions européennes et le hissent parmi les dispositifs d’encadrement de la rémunération des mandataires les plus rigoureux de l’Union européenne.

Le mécanisme, adopté en 2016 et refondu en 2019, a opéré un vrai bouleversement du régime juridique de la rémunération des dirigeants de sociétés cotées et, en creux, des règles de gouvernance, avec un transfert – certes partiel – de la compétence originelle du conseil aux actionnaires en matière de rémunération. Le say on pay participe à cet égard d’une dynamique d’ensemble de responsabilisation des grands acteurs privés, où l’alignement des intérêts, la transparence, la mesure et la compétitivité, y compris sur le volet des rémunérations, comptent parmi les paradigmes d’une bonne gouvernance.

Ce mouvement a contribué à la précipitation, à l’effervescence et à la rigueur législatives ayant marqué le say on pay. Le régime actuel est celui issu de l’ordonnance n° 2019-1234 du 27 novembre 2019 et son décret n° 2019-1235 du même jour, pris en application de la loi Pacte dans le cadre de la transposition de la directive « Droit des actionnaires II », dont l’objectif principal était la mise en place d’un cadre unifié et cohérent régissant la détermination et le versement des rémunérations des mandataires de sociétés cotées sous le contrôle des actionnaires. La politique de rémunération, autour de laquelle ce contrôle, ex-ante (sur la politique elle-même) comme ex-post (sur le résultat de cette politique), s’exerce, constitue la figure de proue du dispositif.

Le régime ainsi mis en place est complexe et n’évite pas les difficultés d’interprétation et d’application, à rebours de l’objectif de cohérence posé par le législateur. Si les efforts de la soft law, de la pratique et des émetteurs contribuent à atténuer sinon gommer certaines de ces difficultés, le régime de la rémunération des mandataires souffre encore, à certains égards, d’une insécurité juridique relative.

Alors que la législation est stabilisée, que la pratique s’est approprié le dispositif du say on pay et que des réflexions sont menées sur une possible évolution de ce dernier, l’heure est au bilan. À l’image d’un say on pay pluriel, le présent dossier entend mener une analyse plurielle des difficultés, juridiques comme pratiques voire politiques, posées par le dispositif du say on pay, son application et son appréhension, ce aussi bien pour sa face recto (contrôle ex-ante, sur la politique de rémunération) que pour sa face verso (contrôle ex-post, sur la mise en œuvre de la politique de rémunération). 

Dans ce dossier, vous trouverez les articles suivants :

  • Le say on pay
  • La face recto du say on pay : le contrôle ex-ante de la politique de rémunération
  • La face verso du say on pay : le contrôle ex-post de la mise en œuvre de la politique de rémunération
Pierre-Mudet

Pierre Mudet

Associé

Pierre Mudet intervient principalement dans les domaines du droit boursier, des fusions-acquisitions et du droit des sociétés auprès d’une clientèle de sociétés cotées et non cotées dans le cadre d’opérations nationales et internationales.

Il conseille des groupes industriels, des banques, des fonds d’investissement et des sociétés innovantes dans le secteur des nouvelles technologies.

Fabienne-Kerebel

Fabienne Kerebel

Counsel

Elle a acquis une solide expertise du droit des sociétés cotées et non cotées et ses différentes composantes, en particulier le private equity et les fusions-acquisitions.

À ce titre, Fabienne conseille entreprises et dirigeants sur leurs opérations de croissance externe, l’évolution de leur gouvernance ou de l’actionnariat, l’intéressement des managers-clefs ou la réorganisation des structures sociétaires. Elle a développé une pratique approfondie des opérations sur titres financiers qui lui permet d’accompagner aussi bien start-up, PME et ETI dans leurs levées de fonds qu’investisseurs à tous les stades de leur investissement.